Alimentation : viande ou vegan en 2050 ?

Loin de la guerre qui fait rage autour de la viande, les industriels de l’alimentation regardent froidement les tendances consommateurs, sans émotion, pour pressentir les aliments attendus à l’avenir. Tendances décryptées au CFIA 2018, Salon des fournisseurs des industries agroalimentaires.

Alimentation : viande ou vegan en 2050 ?
Alimentation : viande ou vegan en 2050 ?

« Certes, la part de produits d’origine animale baisse un peu : -1,2 % depuis 2013.  Si les œufs et les poissons enregistrent une petite baisse, c’est la viande qui chute le plus : - 7,9 % ». Mais pour Sophie de Reynal, directrice marketing au Club Pai et conférencière au CFIA 2018, les raisons des consommateurs sont diffèrent.

Manger moins de viande : pas pour les mêmes raisons

 Il y a ceux qui en mangent moins qu’ils ne l’ont fait, pour des raisons dites de « santé ». Il y a les plus jeunes générations qui pensent à l’environnement : le bilan carbone est plus lourd pour produire un kilo de viande que de protéine végétale. D’autres invoquent le bien-être animal et ne consomment plus de viande, ou bien réclament des produits garantissant des conditions de production respectant mieux les animaux.

 

Les végétariens très courtisés 

Néanmoins, les végétariens dont on parle beaucoup restent très peu nombreux : moins de 2  % en France, 5% en Grande Bretagne. Par contre, la tendance « flexitariens » concernerait 34 % des ménages français. Et plus particulièrement les jeunes et les seniors.

Quant au marché des vegans, qui ne veulent consommer de viande sous aucun aspect -qu’il soit alimentaire, vestimentaire ou autre-, il concerne des profils très typés. Plutôt des femmes, de moins de 44 ans, c’est-à-dire de nouvelles générations qui ont grandit en entendant parler de cette tendance.

 

Le marché des substituts à la viande reste faible

Pour ne pas être en reste, les industriels de l’agroalimentaire ont massivement développé des produits végan dans leurs gammes. Histoire d’être prêts au cas ou… le marché exploserait.

Les allégations d’aliments « avec protéines végétales » ont bondi : + 14% pour les aliments alternatifs aux produits carnés, + 24% pour aliments « en alternative aux produits laitiers ». Néanmoins, ramenés à leurs valeurs ajoutées, leur poids sur le marché reste faible. Ils ne pèsent pas grand-chose comparé au marché du bio, qui explose littéralement en % et en valeur absolue (7 milliards d’euros aujourd’hui).

La « naturalité » l’emporte sur le sans viande

En fait, une grande majorité de consommateurs recherchent avant tout de la « naturalité » dans les produits qu’ils achètent. C’est-à-dire des produits sains, plutôt bio ou se rapprochant du bio, sans additifs ou produits chimiques, pas trop transformés, produit dans des conditions transparentes et si possible localement ou pas trop loin.

Au-delà des ingrédients, les consommateurs actuels pensent plus largement leurs achats alimentaires : conditions de production, impact environnemental, emplois locaux, cout payé aux producteurs… Toutes ces réflexions, émergentes, se bousculent avec peu de clarté. Les consommateurs ont bien sûr du mal à s’y retrouver et nous n’en sommes qu’aux balbutiements des nouveaux comportements d’achats alimentaires. Mais il devient évident que l’ensemble de ces critères – environnementaux, sociaux, économiques- va façonner les nouveaux réflexes d’achats dans les années à venir. Et cela dépasse largement la dichotomie viande/ pas viande.

 

Véganisme : bombe à retardement ?

C’est la raison pour laquelle, le véganisme n’est peut-être qu’une bulle qui risque d’exploser un jour ou l’autre. Comme le rappelle Sophie de Reynal, « les substituts à la viande sont loin de répondre aux critères de naturalité attendus. Prenez les burgers végétaux : il faut y ajouter des texturants, aromes, beaucoup d’additifs pas toujours naturels. Quant aux amandes, très à la mode comme substitut aux produits laitiers, il faut savoir que leur production est loin d’être bonne pour l’environnement : assèchement des nappes phréatiques en Californie, grande zone de production mondiale, utilisation de produits chimiques… Le riz et le soja, utilisés comme substituts de lait, sont issus de semences OGM ». Alors, bombe à retardement, le véganisme ?

Trouvons le bon équilibre

Il convient sans doute de rester raisonnable en tout. Des protéines végétales, de la viande… et de trouver un équilibre qui permette à la fois une production mondiale permettant de nourrir tout le monde, dans des volumes qui permettent de respecter des conditions de productions décentes pour l’environnement. Mais aucun expert aujourd’hui ne détient la recette miracle. Pa mêmes les chercheurs du Cirad, qui ont pourtant longuement planché sur la question.